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Mathurin Méheut (1882-1958) - "Femmes pagures" dit aussi "Femmes bernard-l'ermite", 1926 - Tempera sur toile, 210 x 228 cm - collection Gilles Baratte

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Un grand Méheut en dépôt

Le musée expose au 1er étage - salle 23 - un dépôt d'un collectionneur privé particulièrement spectaculaire.

Ce magnifique dépôt, consenti par un collectionneur malouin, nous permet de présenter une des compositions les plus emblématiques de l’art de Mathurin Méheut. Cet artiste, on le sait, a excellé dans le domaine du grand décor, concevant des ensembles, où l’univers maritime des côtes bretonnes a souvent été interprété avec une verve éblouissante. Ici, le cadre de cette grande toile, peut-être commandée par le banquier et mécène Albert Kahn, s’inspire des anfractuosités marines qui bordent le plateau des Duon en face de Roscoff. Les rochers tapissés d’algues aux teintes mordorées, certaines espèces sont en réalité des variétés observées à Hawaï !, forment un somptueux écrin autour de deux étranges créatures. Et pour cause, Méheut invente ici une sorte de femme-coquillage qui rafraîchit singulièrement l’iconographie habituelle des sirènes. Ainsi, ces deux femmes-bernard-l’hermite ou femmes-pagures devisent tranquillement dans un univers ruisselant et étrange. Le modèle de dos n’est autre que la fille de Méheut, Maryvonne, dont on reconnaît les longs cheveux tressés en natte. Lui faisant face, sa coreligionnaire porte une coiffure à la garçonne, seule concession au goût de l’époque et sympathique clin d’œil d’un peintre qui observe avec tendresse la mue prochaine de sa grande fille.

 

Méheut, d’origine bretonne, commence comme illustrateur spécialisé dans la faune et la flore pour la revue « Art et décoration ». Il effectue de 1911 à 1913 un séjour dans la station biologique du port de Roscoff afin d’étudier les poissons et les crustacés. Il se passionne alors pour le monde de la pêche et du goémon. A l’issue d’une importante exposition personnelle en 1913 au musée des arts décoratifs à Paris, Méheut reçoit le prix de la Fondation Albert Kahn. Cela lui permet d’entreprendre un tour du monde et, en particulier d’aller étudier l’art du Japon qui l’intéresse fortement. Par la suite, à l’occasion de séjours dans différents lieux de Bretagne, Méheut, auteur de milliers de dessins, aborde différents genres et thèmes de l’art décoratif. Il continue l’illustration de livres et se consacre à la réalisation de nombreuses pièces dans les faïenceries quimpéroises et à la manufacture de Sèvres. Son célèbre service « la mer » est toujours en usage au restaurant Prunier à Paris. Il est devenu un décorateur réputé, travaillant pour la décoration de vingt navires comme le paquebot « Le Normandie », participant aux grandes expositions parisiennes d’art décoratif en 1925, 1931 et 1937, peignant le grand auditorium de la salle des nations à Pittsburgh en 1930 ou décorant l’Institut de géologie de Rennes en 1940. Peintre de la marine, Méheut est le plus important peintre breton de l’entre-deux-guerres.