Max Jacob et ses amis

PORTRAIT DE MAX JACOB À L’ÉTOILE JAUNE

Jean Boullet (1921-1970)

1943

Agrandir l'image jpg 273Ko (Voir légende ci-après) (fenêtre modale)
Jean Boullet (1921-1970) - Portrait de Max Jacob à l’étoile jaune, 1943 - Encre de Chine sur papier, 30 x20 cm - Musée des beaux-arts de Quimper © Musée des beaux-arts de Quimper

Encre de Chine sur papier

2015-3-1

Achat avec l’aide de l’association des Amis du musée des beaux-arts de Quimper et du FRAM en 2015

H. 30 cm - L. 20 cm

L’entrée dans les collections du musée des beaux-arts de Quimper de l’unique portrait localisé de Max Jacob portant l’étoile jaune est précieuse à plusieurs titres. Ce dessin associe en effet la figure du grand poète quimpérois, dans un contexte historique particulièrement dramatique, l’art de Jean Boullet, artiste intimement lié au monde littéraire et personnalité aux activités multiformes et, enfin, la qualité de son dernier possesseur, le poète Élie-Charles Flamand.

La fin tragique de Max Jacob, arrêté par la Gestapo en février 1944 et interné à Drancy dans l’attente d’un convoi pour Auschwitz, puis victime d’épuisement quinze jours plus tard, alors que ses amis (Cocteau, Guitry et bien d’autres…) s’activaient pour obtenir sa libération, est un des drames les plus poignants d’une époque qui en comptait tant. Cette image prend en effet une dimension particulière lorsqu’on considère le destin du poète, né de confession juive, converti au catholicisme à l’âge de quarante ans, et qui, en expirant, évoquera sa foi en s’écriant : « j’ai tant prié pour cette passion ». Quel symbole en effet que la mort de Jacob, arrêté comme juif et mourant en chrétien après avoir porté pendant deux ans la terrible étoile jaune.

La « salle Max Jacob » du musée des beaux-arts de Quimper conserve ce morceau de tissus qui était cousu sur la veste de l’écrivain, relique aujourd’hui visible à côté du présent portrait. C’est durant cette période que Jean Boullet réalisa deux portraits de Jacob, l’un en 1942, et celui-ci, daté de 1943, connu par sa reproduction dans le journal Carrefour. Cette effigie saisissante de Max Jacob restitue les traits reconnaissables du modèle, auquel l’artiste a donné l’expression d’une sorte de résignation tragique. La technique singulière de Boullet  confère au graphisme lugubre de l’étoile une dimension particulièrement forte.

Le dessinateur n’avait que vingt-deux ans lorsqu’il dessina Jacob. Homosexuel comme lui, ce futur « peintre de la beauté masculine », tel qu’il se qualifiait lui-même, devait côtoyer le monde du Saint-Germain-des-Prés de l’après-guerre. Libertaire, anticonformiste, voire provocateur, Boullet avait pour amis Cocteau, Guitry, Marcel Carné, Juliette Greco, ou encore Marie-Laure de Noailles. Illustrateur de Poe, Villon et Verlaine mais aussi de nombreux contemporains dont le Boris Vian de J’irai cracher sur vos tombes, il devait inlassablement consacrer son dessin très reconnaissable à des sujets oniriques ou homo-érotiques, tout en se passionnant pour le cinéma fantastique, avant de trouver une mort tragique en Algérie, à l’âge de quarante-neuf ans. La manière avec laquelle Jean Boullet sut saisir l’image de Max Jacob, icône d’un martyr à la destinée complexe (juif, chrétien, homosexuel), et ce dans les premières années de sa vie artistique, forme ainsi tout un symbole ; nul mieux que lui ne pouvait, peut-être, comprendre le sens profond qu’il fallait donner à ce portrait.

Jean-David Jumeau-Lafond
Historien de l'art

Max Jacob et ses amis

PORTRAIT DE MAX JACOB À L’ÉTOILE JAUNE

Jean Boullet (1921-1970)

1943

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Jean Boullet (1921-1970) - Portrait de Max Jacob à l’étoile jaune, 1943 - Encre de Chine sur papier, 30 x20 cm - Musée des beaux-arts de Quimper © Musée des beaux-arts de Quimper

Encre de Chine sur papier

2015-3-1

Achat avec l’aide de l’association des Amis du musée des beaux-arts de Quimper et du FRAM en 2015

H. 30 cm - L. 20 cm

L’entrée dans les collections du musée des beaux-arts de Quimper de l’unique portrait localisé de Max Jacob portant l’étoile jaune est précieuse à plusieurs titres. Ce dessin associe en effet la figure du grand poète quimpérois, dans un contexte historique particulièrement dramatique, l’art de Jean Boullet, artiste intimement lié au monde littéraire et personnalité aux activités multiformes et, enfin, la qualité de son dernier possesseur, le poète Élie-Charles Flamand.

La fin tragique de Max Jacob, arrêté par la Gestapo en février 1944 et interné à Drancy dans l’attente d’un convoi pour Auschwitz, puis victime d’épuisement quinze jours plus tard, alors que ses amis (Cocteau, Guitry et bien d’autres…) s’activaient pour obtenir sa libération, est un des drames les plus poignants d’une époque qui en comptait tant. Cette image prend en effet une dimension particulière lorsqu’on considère le destin du poète, né de confession juive, converti au catholicisme à l’âge de quarante ans, et qui, en expirant, évoquera sa foi en s’écriant : « j’ai tant prié pour cette passion ». Quel symbole en effet que la mort de Jacob, arrêté comme juif et mourant en chrétien après avoir porté pendant deux ans la terrible étoile jaune.

La « salle Max Jacob » du musée des beaux-arts de Quimper conserve ce morceau de tissus qui était cousu sur la veste de l’écrivain, relique aujourd’hui visible à côté du présent portrait. C’est durant cette période que Jean Boullet réalisa deux portraits de Jacob, l’un en 1942, et celui-ci, daté de 1943, connu par sa reproduction dans le journal Carrefour. Cette effigie saisissante de Max Jacob restitue les traits reconnaissables du modèle, auquel l’artiste a donné l’expression d’une sorte de résignation tragique. La technique singulière de Boullet  confère au graphisme lugubre de l’étoile une dimension particulièrement forte.

Le dessinateur n’avait que vingt-deux ans lorsqu’il dessina Jacob. Homosexuel comme lui, ce futur « peintre de la beauté masculine », tel qu’il se qualifiait lui-même, devait côtoyer le monde du Saint-Germain-des-Prés de l’après-guerre. Libertaire, anticonformiste, voire provocateur, Boullet avait pour amis Cocteau, Guitry, Marcel Carné, Juliette Greco, ou encore Marie-Laure de Noailles. Illustrateur de Poe, Villon et Verlaine mais aussi de nombreux contemporains dont le Boris Vian de J’irai cracher sur vos tombes, il devait inlassablement consacrer son dessin très reconnaissable à des sujets oniriques ou homo-érotiques, tout en se passionnant pour le cinéma fantastique, avant de trouver une mort tragique en Algérie, à l’âge de quarante-neuf ans. La manière avec laquelle Jean Boullet sut saisir l’image de Max Jacob, icône d’un martyr à la destinée complexe (juif, chrétien, homosexuel), et ce dans les premières années de sa vie artistique, forme ainsi tout un symbole ; nul mieux que lui ne pouvait, peut-être, comprendre le sens profond qu’il fallait donner à ce portrait.

Jean-David Jumeau-Lafond
Historien de l'art

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