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Refixage des soulèvements picturaux pour le transport : spatule chauffante © Gwenola Corbin

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Restauration en cours : le décor de Kermoor

En décembre 2019, la Ville se portait acquéreur de l'ensemble des 5 panneaux du décor du restaurant de l'hôtel Kermoor de Pierre De Belay peint en 1923. Le décor est arrivé au musée à l'été 2020. Sa restauration a pu débuter à l'automne. Récit en images du travail en cours.

Le travail de restauration a été divisé en deux campagnes. Gwenola Corbin, restauratrice agréée de peinture, a pris en main un travail de longue haleine.

Après l'établissement d'un constat d'état minutieux, une liste des interventions a été arrêtée pour rendre au décor toute sa lisibilité. Le chantier a démarré avec "La Dégustation du cidre en Pays bigouden". Il se poursuit avec "La Fête du 14 juillet en Bretagne".

1. Pour chaque panneau, la première étape consiste à refixer les soulèvements de couche picturale susceptibles de tomber lors du transport. Pour cela, on utilise une mini-table aspirante que l’on place sous le tableau. On applique l’adhésif sur la couche picturale et on chauffe la surface, à travers un papier siliconé transparent, à l’aide d’une spatule chauffante. La chaleur assouplit la peinture et permet de remettre dans le plan les écailles.

2. Le tableau rejoint ensuite l’atelier de restauration de Kiriaki Tsesmeloglou, l’Atelier K à Nantes. Il est équipé d’une table chauffante aspirante basse pression, permettant le refixage général et homogène de la couche picturale. La toile est alors déposée de son châssis, dépoussiérée et tendue sur un bâti de travail extensible. Pour cela, les bords de clouage de la toile sont aplanis (à l’aide d’humidité et de chaleur) et des bandes de tension en toile polyester sont collées à chaud en périphérie. Dans le cas présent, il a fallu retirer des bandes de tension d’une ancienne restauration et surtout l’adhésif inadapté qui fut employé et qui a débordé sur la face de l’œuvre. La dérestauration est une étape fréquente dans le travail de restauration et incite à toujours envisager l’éventuelle dérestauration des interventions actuelles.

3. La couche picturale présente, pour quatre des cinq tableaux du décor, un défaut d’adhésion important nécessitant un refixage général.
Avant d’appliquer l’adhésif de refixage, il faut tenter de décrasser la surface peinte dans la mesure du possible pour éviter de coller la crasse. Cependant on ne nettoie pas les zones présentant des soulèvements car on risque de retirer des écailles de peinture.
Un adhésif, sélectionné à la suite de tests, est appliqué sur la couche picturale et le refixage est réalisé sur la table aspirante. Le papier siliconé et transparent que l’on place à la face, permet de « faire le vide ». Ainsi les écailles sont remises dans le plan sans que pour autant la peinture soit écrasée.
Le tableau est ensuite retendu sur un nouveau châssis. L’ancien châssis était fragilisé et de section trop faible pour ce format.

4. Le tableau peut rejoindre l'atelier de Gwenola Corbin. Il va faire l’objet d’un nettoyage. On achève son décrassage et on retire le vernis trop oxydé. Un vernis oxydé ne joue plus son rôle de protection de la couche picturale et son jaunissement perturbe la lecture esthétique de l’œuvre. Pour le retirer, on emploie des solvants que l’on sélectionne à la suite de tests.Les tableaux de ce décor présentent diverses campagnes de retouche mais aussi de nombreux surpeints plus ou moins épais (Contrairement à la retouche qui se limite aux zones de peinture manquante, les surpeints débordent largement sur la peinture originale). Le schéma joint aux photographies localise les surpeints en couleur. Ceux de couleur verte ont été retirés. Les surpeints ou retouche sont solubilisés à l’aide de solvants, tout comme le vernis.Le choix de retirer ou de conserver des surpeints se fait en concertation avec les conservateurs. Il s’agit d’une opération délicate, notamment parce qu’on ne sait pas dans quel état est la couche picturale originale qui se trouve dessous. Nous avons donc choisi de retirer des surpeints trop dissonants ou les surpeints qui déséquilibraient la composition. En effet, sur un même tableau, Pierre De Belay peut peindre en pâte, demi-pâte et jus. Souvent les surpeints ont bouché des surfaces travaillées en jus (peinture très diluée).

5. Avant de procéder à la retouche, on applique un mastic dans les lacunes pour retrouver la hauteur de la couche picturale. On vernit ensuite le tableau. Le liant de retouche sera toujours différent du liant de la couche picturale, pour permettre la réversibilité de notre intervention.
Comme il s’agit d’un décor, qui s’observe d’assez loin, nous procédons à une retouche moins poussée que sur un petit tableau. Le niveau de retouche est également discuté avec les responsables de la conservation de l’œuvre.
Une fois la retouche terminée, un vernis final est pulvérisé pour harmoniser les matités et les brillances. L’aspect final du vernis est également choisi par les conservateurs.

Le travail se poursuit... Au second semestre 2021, deux autres panneaux seront restaurés et le dernier l'année prochaine.

> Retour sur cette fabuleuse vente et le démontage du décor